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Supports et circulation des savoirs et des arts en Afrique et au-delà

Séminaire organisé par Claire Bosc-Tiessé, CNRS / IMAF ; Carlo Célius, CNRS / IMAF ; Jean-Paul Colleyn, EHESS / IMAF (cet enseignant est référent pour cette UE) ; Anne Doquet, IRD / IMAF ; Christine Douxami, Université de Franche-Comté / IMAF et Éric Jolly, CNRS / IMAF

Année universitaire : 2016 / 2017
Périodicité : 2e et 4e vendredis du mois de 11 h à 13 h
Calendrier : Du 25 novembre 2016 au 23 juin 2017
 Vendredi 25 novembre 2016 : salle de réunion, IMAF, 2e étage, 96 bd Raspail
 Vendredi 9 décembre 2016 : salle des artistes, 96 bd Raspail
 Vendredi 13 janvier 2017 : salle des artistes, 96 bd Raspail
 Vendredi 27 janvier 2017 : salle 13, 105 bd Raspail
 Vendredi 10 février 2017 : salle des artistes, 96 bd Raspail
 Vendredi 24 février 2017 : bibliothèque du CENA, 4e étage, 105 bd Raspail
 Vendredi 10 mars 2017 : salle des artistes, 96 bd Raspail
 Vendredi 24 mars 2017 : salle de réunion, IMAF, 2e étage, 96 bd Raspail
 Vendredi 28 avril 2017 : SÉANCE ANNULÉE ET REPORTÉE AU 2 JUIN
 Vendredi 12 mai 2017 : salle des artistes, 96 bd Raspail
 Vendredi 2 juin 2017 : Séance exceptionnelle, salle 13, 105 bd Raspail
 Vendredi 9 juin 2017 : salle des artistes, 96 bd Raspail
 Vendredi 23 juin 2017 : salle 13, 105 bd Raspail

Présentation :
Le séminaire cherche à mettre en perspective les rapports complexes entre la création artistique contemporaine en Afrique et le monde globalisé, qu’il s’agisse de danse, de théâtre, d’arts plastiques, de photographie, de cinéma, de musique, de littérature, d’arts numériques. Les anciens rapports dominé-dominant sous-tendent encore certaines conceptions de ce qui constitue (ou non) une œuvre d’art. Quels sont les critères esthétiques retenus par les créateurs africains au moment de leur réalisation artistique ? Quels sont les rapports entre les artistes du « nouveau monde » et l’Afrique ? Les artistes qui, jusqu’à il y a peu, venaient se former dans les écoles d’art des anciens pays colonisateurs le font-ils encore aujourd’hui ? Alors que l’Inde, le Brésil, la Chine, subventionnent certaines réalisations artistiques africaines contemporaines, qu’en est-il des liens avec l’ancienne métropole. En d’autres termes, quels sont les rapports de pouvoir (esthétiques, matériels) entre les créateurs africains (y compris la diaspora) et le « monde de l’art » ? Comment se positionnent les artistes par rapports à des mouvements historiques comme la « négritude », le panafricanisme, les différentes formes d’affirmations identitaires, la reconnaissance de « patrimoines immatériels » ? Entre ici et là-bas, entre réseaux locaux sur le sol africain où ils créent des écoles d’art, des centres chorégraphiques, des ateliers de théâtre ou autres « performances », les artistes du continent développent de nouveaux paradigmes que nous tenterons d’éclairer.

Adresse(s) électronique(s) de contact : elisabeth.dubois(at)ehess.fr

PROGRAMME

 25 novembre 2016
Cécile CANUT, professeur en sociolinguistique à l’Université Paris-Descartes.

Autour de "L’île des femmes", moyen-métrage (2014) :
Ja, jeune femme de Cabral, n’est pas partie "chercher sa vie" ailleurs comme tant d’autres au Cap-Vert. Elle n’est jamais sortie de son village. Ja décide de faire le tour de son île, à la rencontre de femmes qui s’adonnent comme elle à l’étonnante pratique corporelle du batuke. Au cours du périple, nous découvrons "celles qui restent" et qui surmontent ensemble, à travers cette expression, la rudesse et l’acuité de la séparation.
Le batuke fait partie des formes musicales les plus anciennes de l’île de Santiago. Caractérisé par un rythme euphorique, des mouvements saccadés du corps, une orchestration basée sur les voix et les percussions, il est devenu essentiellement féminin : les femmes ont remplacé le tambour par un paquet de tissu coincé entre leurs cuisses sur lequel elles tapent, l’une d’entre elles chante des poèmes où il est question de leur vie quotidienne, des difficultés de la vie de couple, ou de la séparation. Pour survivre, leurs maris, leurs frères mais aussi leurs soeurs et leurs mères partent à l’étranger pour nourrir leur famille rester au pays.

 09 décembre
Jean-Baptiste ECZET, postdoc à l’Ehess - IIAC/LAIOS,
Pertinence(s) de la statuaire africaine

Résumé :
Certaines caractéristiques formelles sont récurrentes dans une partie de la statuaire africaine et sont issues d’une volonté de réalisme selon une épistémologie singulière. La ressemblance, une notion importante en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale, émerge d’un point de vue spatial spécifique. La sculpture présente alors une image elle-même en profondeur (ou perspective anamorphosée). Plusieurs conditions se dégagent de cette « sculpture en profondeur », notamment l’usage des raccourcis, propre au dessin en occident. Cette caractéristique produit en conséquence, sur certaines faces, des disproportions, ou aberrations, qui sont les conséquences collatérales de l’optimisation d’un point de vue unique.
Or, certaines de ces conséquences collatérales ont successivement fait l’objet d’une attention particulière par les musées et les artistes en Europe, multipliant ainsi les pertinences de cette statuaire.

 13 janvier 2017
Vassili RIVRON, Maître de Conférences UCBN,
Supports numériques et objectivation culturelle : médias sociaux, réunification Ekang et mobilisations artistiques

Résumé :
L’usage des médias sociaux à suscité la création d’un certain nombre de « groupes Facebook» identifiés à des groupes ethniques, notamment africains. Ces espaces d’échange permettent d’observer des modalités originales de préservation de la diversité linguistique et de recomposition de l’appartenance ethnique. Dans le cas étudié à propos de groupes d’Afrique Centrale, nous assistons d’un côté à une codification de langues qui n’étaient pas habituellement écrites, contribuant à leur usage courant sur les médias sociaux, transmettant des compétences et des héritages littéraires, unifiant et homogénéisant des patrimoines culturels. De l’autre, ces nouveaux registres communicationnels suscitent des changements profonds dans le statut de ces langues et ont mené à rapprocher et repenser, par delà les frontières nationales, des familles linguistiques d’intercompréhension comme un groupe ethnique à part entière, menant y compris à l’investissement rapide d’un ethnonyme récemment réactivé, par des artistes locaux ou de la diaspora.

 27 janvier
Gustave AKAKPO, écrivain de théâtre togolais

 10 février
Federico VARRASSO , cinéaste, chercheur associé au HAR-Paris Ouest-Nanterre La Défense, chercheur post-doctorant au CRIA de l’Institut Universitaire de Lisbonne
Images, imaginaires et univers religieux afro-haïtien : de la mise en représentation à la réappropriation, un archétype de la globalisation

Résumé :
Prenant appui sur l’analyse d’échanges de représentations visuelles ayant eu cours du début du vingtième siècle à nos jours entre univers religieux afro-américain haïtien et culture populaire occidentale, nous verrons au cours de ce séminaire comment les images peuvent être envisagées en tant qu’« objets pivots », véhicules de transactions entre croyances religieuses et imaginaires sociaux dans un contexte interculturel et globalisé.
(Présentation avec extraits de films et autres)

 24 février
Mathieu ABONNENC, artiste plasticien

 10 mars
Manthia DIAWARA, Professeur à New York University,
Autour du débat Léopold Sedar Senghor et Wole Soyinka à propos de la négritude

 24 mars
Kouam TAWA, auteur de théâtre du Cameroun
Autour de son oeuvre.

 28 avril, SÉANCE REPORTÉE AU 2 JUIN

 12 mai
Thomas FOUQUET, chargé de recherche au CNRS - IMAF
Penser la blackness depuis l’Afrique : un renversement heuristique

Résumé :
Depuis quelques années, un effort certain a été produit pour documenter l’insertion des sociétés africaines dans les processus historiques globaux, rompant ainsi clairement avec les présupposés d’enclavement et d’anhistorisme qui leur ont longtemps été attribués. « Lire le monde » depuis l’Afrique constitue désormais un projet intellectuel et scientifique pleinement légitime, resté néanmoins encore assez programmatique. Dans la vaste trame sociale-historique de l’extraversion qui se dessine ainsi, certaines tendances « noires » assimilables au registre de la blackness transnationale paraissent, parmi d’autres, occuper une place particulière. Aussi, s’agissant de l’Afrique, en quoi l’affirmation d’un être-noir peut-elle s’assimiler à l’expression subjective d’un être-au-monde, par comparaison avec les expériences diasporiques d’Amérique du nord et d’Europe notamment ? Quels récits d’une africanité cosmopolite s’y rapportent, en prise avec quels rapports d’autorité et schémas de domination aussi bien locaux que globaux ? Et en quoi rejoignent-ils ou au contraire s’opposent-ils à d’autres narrations plus anciennes ou adossées à des conceptions radicalement différentes de la place de l’Afrique dans le monde (négritude, panafricanisme, afrocentrisme, ou encore afropolitanisme et afrofuturisme) ?
En repartant de ce type d’interrogations, et en m’appuyant sur mes propres travaux à Dakar parmi les « aventurières de la nuit » mais aussi sur les contributions rassemblées dans un dossier de Politique africaine (« Blackness », décembre 2014), je proposerai quelques pistes de réflexions quant à un questionnement de la blackness depuis le continent africain. Loin de réifier une communauté « black » transnationale et d’en suggérer la cohérence ou l’unité, la discussion portera sur des modalités chromatiques de signification du pouvoir et de la domination qui se déploient tant à échelle locale que globale, et en postulant leur diversité intrinsèque.

Sarah FILA-BAKABADIO, maître de conférences à l’Université Cergy-Pontoise
Image(s) et positionalités du corps dans l’Atlantique noir

Résumé :
A partir de l’article publié en décembre 2015 dans Politique africaine, intitulé "Photographie et géographie corporelle de l’Atlantique noir", il s’agira de prolonger la réflexion alors engagée sur le rôle de la photographie en tant qu’instrument de cartographies du corps noir formées depuis l’Atlantique noir. En m’appuyant sur des travaux de photographes africains et afro-américains comme Carrie Mae Weems, Ingrid Mwangi, Rotimi Fani-Kayode ou Kudzanai Chiurai et en empruntant au champ des histoires connectées, j’envisagerai le corps noir comme un espace de circulation où des histoires, des cultures et des identités se superposent et interagissent pour former des géographies de l’appartenance. Je discuterai du rôle de la photographie comme instrument d’une positionalité atlantique et évoquerai les reconfigurations raciales, sociales et de pouvoir que ces œuvres initient dans un dialogue en et hors d’Afrique qui, lui-même, ouvre vers une discussion sur le cosmopolitanisme noir.

 2 juin
Séance exceptionnelle (cf. 28 avril)
Nadège CHABLOZ, EHESS - IMAF
Partir pour guérir. Mobilités des pratiques religieuses et thérapeutiques entre l’Afrique et l’Europe.

Résumé :
Les parcours d’Européens se rendant en Afrique pour trouver des réponses thérapeutiques et spirituelles sont peu documentés. Cette contribution propose — notamment à travers un film documentaire (Bwiti et iboga en VF (2). Itinéraire d’un initié militant, 52 min., 2011, autoproduction) — d’explorer les mobilités d’individus (français, anglais, danois) qui après avoir pratiqué un rite initiatique local (bwiti au Gabon, lila derdeba des Gnawa au Maroc) pour guérir leurs maux, sont devenus des promoteurs actifs de ces rites et de leurs aspects artistiques dans les pays concernés ainsi que sur la scène internationale.

 09 juin
Daniel SOUTIF, Commissaire de l’exposition Color Line au Musée du Quai Branly.

 23 juin
Ana CUOMO, doctorante EHESS - IMAF
Performer son africanité : le rap burkinabè "sur scène"

Résumé :
Cette communication sera axée sur une observation de concerts de rap burkinabè, inscrite dans une ethnographie "multi-située" (Marcus) dans le cadre d’une thèse d’anthropologie en cours sur la pratique du rap au Burkina Faso. Après avoir composé un album, les rappeurs étudiés doivent ensuite le défendre sur scène localement puis, pour certains, en France. Il s’agira de mettre l’accent sur les différents régimes d’authenticité qui s’expriment à travers les vêtements, les discours, les morceaux joués, le format du concert (live, playback), en regard du contexte de la prestation (concert de quartier, festival Hip-Hop, festival africain en France...). Cette anthropologie de la performance cherche à comprendre ce qui se joue pour ces artistes, et sur quelles scènes : accès à une reconnaissance plus large, valorisation d’une identité nationale, ou africaine, "conscientisation" du public, etc. Le concert apparait ici comme un site privilégié où se déploient différentes manières de performer, voire de miser sur tel ou tel registres de différenciation sous-tendus par des représentations autour de l’"africanité".

Elina DJEBARI, chercheure associée, post-doctorante au King’s College London
Dialogues musicaux et diplomatie culturelle entre Cuba et l’Afrique de l’Ouest, 1960-1970

Résumé :
Cette communication propose d’observer les jeux d’aller-retour musicaux et les circulations transnationales de musiciens maliens et cubains à l’aune des nouveaux échanges culturels amorcés entre Cuba et les pays africains ayant adopté une politique socialiste après les indépendances. Dans le contexte politique de la guerre froide, le rôle de la musique comme élément clé de la diplomatie culturelle sera analysé, notamment à travers les conventions culturelles signées entre Cuba et un certain nombre de pays africains dans les années 1960. D’une part, sera étudiée la création de l’orchestre Las Maravillas de Mali à Cuba au milieu des années 1960 par des étudiants maliens envoyés à La Havane pour recevoir une formation musicale de haut niveau. D’autre part, les tournées du célèbre orchestre cubain Orquesta Aragón en Afrique de l’Ouest à partir des années 1970 compléteront la grille d’analyse de ces échanges politiques et musicaux transatlantiques. La communication abordera non seulement la popularité et la contribution de la musique cubaine à la production d’une modernité musicale africaine, mais aussi la (re)création d’une proximité entre l’Afrique et les Caraïbes au moment des indépendances, période marquée par les courants intellectuels de la Négritude et du Panafricanisme. En prenant pour objet d’étude les parcours entremêlés de l’orchestre Las Maravillas de Mali à Cuba et les tournées de la Orquesta Aragón en Afrique de l’Ouest, il s’agira de dévoiler non seulement des enjeux politiques et musicaux, mais aussi des trajectoires individuelles, permettant de mettre à jour plusieurs strates de circulations musicales à travers l’Atlantique Noir tout en révélant le rôle de dynamiques politiques particulières au contexte postcolonial dans l’histoire d’une globalisation musicale transatlantique.