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Anthropologie comparative du Sahel occidental musulman

Séance du 20 décembre 2017, 15h à 17h
IMAF / Site Raspail, salle de réunion, 2e étage, 96 bd Raspail 75006 Paris

 Jean Schmitz (IRD, IMAF)
Deux siècles de jihâd en Afrique de l’Ouest (XVIIIe -XIXe siècles) : abolition restreinte de l’esclavage et déni d’islam

Résumé :
L’Afrique de l’Ouest a connu plus de deux siècles de mouvements islamiques. Suite à des révolutions musulmanes internes émergèrent des imamats territorialisés de la fin du XVIIe à celle du XVIIIe siècle. Ils formèrent une première boucle connectant Mauritanie, Sénégambie et Guinées. Dans un second temps ils furent relayés plus à l’est par les jihâd expansionnistes du XIXe siècle, l’immense califat de Sokoto (Nigeria, Cameroun...) fondé par Uthman dan Fodio à partir de 1804 qui regroupa une trentaine d’émirats et l’État polycentrique d’al-Hajj Umar (m. 1864) au milieu du XIXe siècle (Mali/Guinée...).

La récente synthèse de Paul Lovejoy, Jihâd in West Africa during the Age of Revolutions (2016) insère cette série au sein de l’ère des « révolutions atlantiques » ainsi que du « second esclavage » qui s’instaura au XIXe siècle après l’abolition de la traite. On s’interrogera sur le rôle décisif de l’enrôlement des esclaves au nom de leur ralliement à l’islam dans le succès initial des révolutions musulmanes comme des jihâd. Ultérieurement par une cruelle ironie de l’histoire, les esclaves gagnèrent leur liberté par leur bravoure à capturer d’autres esclaves, en particulier ceux de Sokoto (Philips 2004, Stillwell 2004).

L’analyse processuelle (Sageman 2017) de la révolution musulmane de la vallée du Sénégal dans les années 1770/1780 suivie par la redynastisation des clercs musulmans au XIXe siècle par la création de micro « armées noires », montre les limites d’une abolition de l’esclavage que nous qualifierons de « restreinte » en réponse au livre de Rudolph Ware, The Walking Qur’an (2014). L’ethnographie au long cours des interactions libres/esclaves dans une « capitale » de l’imamat permet de comprendre comment les descendants de l’élite servile cherchent à surmonter le « déni d’islam » dont ils sont victimes jusqu’à aujourd’hui.

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