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Berbères, Arabes, colonisation(s) : notes anthropologiques sur l’extrême-sud tunisien

Gianni Albergoni, Sonia Ben Meriem, François Pouillon, IRMC, Tunis/Med Ali éditions, Sfax, 2018, 239 p.

Dans une Tunisie précocement arabisée et fortement centralisée, les régions dites de « l’Extrême-Sud », à savoir les confins saharo-tripolitains du pays, ont été de longue date signalées comme des zones de dissidence et surtout des ilots « berbères », trait qui allait fortement intéresser les ethnologues (et après eux les guides touristiques). Cela n’allait pourtant pas sans soulever de multiples questions, à commencer par le fait que les Ouerghemma en place dans la région, revendiquent au contraire une origine et une identité arabe.
Inscrits dans une problématique d’anthropologie contemporaine, les contributeurs de ce recueil se sont attachés à analyser ces contradictions, qui renvoient à des repères scientifiques et à des mentalités sociologiques différentes, dans l’historiographie mouvementée de l’arabisation du Maghreb, soit une question qu’il importe d’inscrire dans ses déterminations à la fois particulières et globales.
C’est à des réflexions de ce type qu’il importe de se référer si l’on cherche à penser penser de façon moins désinvolte qu’on le fait d’habitude, quelques questions géopolitiques diablement importantes : Quelles ont été sur le long terme les relations sociales, aujourd’hui réactivées, de part et d’autre de la frontière tuniso-tripolitaine ? Le pouvoir colonial a-t-il cherché en son temps à exploiter politiquement la distinction entre Arabes et Berbères ? Le mouvement national, et spécialement destourien (Habib Bourguiba était, entre 1934 et 1936, assigné à résidence dans la région) s’est-il attaché au contraire à la nier ? L’avènement d’un régime démocratique va-t-il conduire (comme en Kabylie ou dans l’Atlas marocain) à une expression politique des identités fondamentale ?
Pour être d’époques différentes et rédigées dans des contextes scientifiques particuliers, les considérations anthropologiques soulevées dans les pièces rassemblées dans ce livre, interfèrent donc activement avec des préoccupations plus actuelles.

Gianni Albergoni, anthropologue à l’université de Paris-Nanterre, Sonia Ben Meriem, chercheur indépendant en Tunisie, François Pouillon, anthropologue à l’EHESS, ont tous trois conduit des enquêtes approfondies dans la région et, plus largement, dans les espaces agro-pastoraux du monde arabe.