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Soutenance de thèse, « Whitiser, c’est parler comme un Blanc »

« Whitiser, c’est parler comme un Blanc ». Langage, subjectivité et postcolonialité chez des militants afrodescendants d’origine camerounaise à Paris.

Cette thèse analyse le rôle du langage dans les processus de subjectivation et d’émancipation politiques de sujets racialisés en contexte migratoire et postcolonial, à travers le processus de la whitisation symbolique (qui consiste à parler et à se comporter comme un Blanc). L’approche sociolinguistique est pleinement ancrée dans le champ des sciences sociales et dans le paradigme des Studies (Race Studies, Postcolonial Studies, Cultural Studies). Elle permet de montrer les interrelations entre langage, corps et matérialité non verbale dans les processus de racialisation.

La soutenance aura lieu le vendredi 11 octobre à 14h, à l’Université Paris Descartes, dans la salle J 536 du bâtiment Jacob, situé au 45 rue des Saints-Pères, Paris 6e.

Le jury sera composé de
 Asif AGHA, Professeur, université de Pennsylvanie
 Michelle AUZANNEAU, Professeure, université Paris Descartes
 Josiane BOUTET, Professeure émérite, université Paris Diderot
 Cécile CANUT, Professeure, niversité Paris Descartes (Directrice)
 Thomas FOUQUET, Chargé de recherche, CNRS
 Luca GRECO, Professeur, université de Lorraine (rapporteur)
 Isabelle LEGLISE, Directrice de recherche, CNRS (rapportrice)

Résumé de la thèse
Cette thèse interdisciplinaire s’inscrit à la fois dans les champs de la sociolinguistique, de l’anthropologie linguistique et sémiotique nord-américaine et des postcolonial & cultural studies. Elle examine le rôle du langage dans les processus de subjectivation et d’émancipation politique de sujets racialisés en contexte migratoire et postcolonial. Il s’agit de décrire les formes et les enjeux politiques de la whitisation symbolique chez des militants afrodescendants d’origine camerounaise, rencontrés au cours d’une enquête ethnographique dans une association panafricaine de jeunes étudiants, cadres et dirigeants d’entreprise à Paris. Par whitisation symbolique, nous désignons un passing racial métaphorique et une praxis sémiotique complexe permettant au sujet racialisé de gommer les frontières sociales liées au stigmate de la peau noire en « parlant comme un blanc », soit en imitant le langage de l’Autre dominant aux niveaux phonétique, discursif et corporel. Dans un premier temps, l’analyse des performances collectives d’un style « afropolitain » (ou d’Africain cosmopolite) permet de saisir les marques langagières et sémiotiques de la subjectivation - soit la tension entre assujettissement et émancipation - et de discuter la visée critique et émancipatrice de la whitisation symbolique. La partie suivante décrit ensuite, à partir de deux cas individuels, comment les processus de subjectivation politique par le langage et le corps opèrent au croisement des rapports de race, de classe et de genre, tout en produisant des agencements singuliers. Enfin, la dernière partie de la thèse analyse les discours réflexifs des locuteurs sur leurs pratiques langagières et montre comment, dans leur relation au langage de l’Autre, les sujets se positionnent de manière ambivalente au sein de l’économie symbolique postcoloniale en manifestant tantôt des formes de résistance, tantôt des formes d’assujettissement à des rapports de domination qui contraignent leur puissance d’agir. Ainsi, cette recherche montre tout d’abord la nécessité d’une approche sémiotique et interdisciplinaire du langage qui puisse rendre compte des interrelations entre langage et matérialité non verbale. Ensuite, parce qu’elle se focalise sur la dimension langagière et sémiotique des processus de racialisation et de performativité raciale, domaine encore peu exploré, cette recherche contribue à une approche postcoloniale du langage susceptible d’éclairer les ambivalences de l’agency chez des sujets racialisés.

Mots clés : accent, style, langage et corps, subjectivité, race, postcolonialité, migration, diaspora africaine, sémiotique.

Après la soutenance, vous serez chaleureusement convié.e.s à un pot.
Pour une organisation optimale, je vous remercie de bien vouloir m’informer de votre présence.

Suzie Telep
CERLIS (Centre de Recherche sur les Liens Sociaux), université Paris Descartes / CIRPALL, université d’Angers