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L’oeuvre de Pierre Bourdieu en pratiques

Ni gauche, ni droite ! Existe-t-il encore un vote de classe ?

Argument scientifique

Nombre d’observateurs de la société et de la sociologie électorale semblent se satisfaire de l’idée selon laquelle, il n’y a aurait plus désormais, dans la « modernité » politique de vote de classe ? Est-elle réaliste ? Si oui, dans quelle mesure ? Pour quels aspects ? Telle est la question de départ de la 15e édition de « l’oeuvre de Pierre Bourdieu en pratiques » prévue au printemps 2017.

Croisant sciences politiques et sciences sociales, il s’agira d’observer le clivage politique entre droite et gauche, ainsi que la (les) politique(s) et les votes au prisme des sciences sociales. En effet, « le champ politique est le lieu où s’engendrent, dans la concurrence entre les agents qui s’y trouvent engagés, des produits politiques, problèmes, programmes, analyses, commentaires, concepts, événements, entre lesquels les citoyens ordinaires, réduits au statut de « consommateurs », doivent choisir, avec des chances de malentendu d’autant plus grandes qu’ils sont plus éloignés du lieu de production. » Le champ politique est le champ suprême, le champ des champs sociaux. En tant que champ, il est un espace de rapports de positions relatives, et partant, un espace de rapports de force. Champ le plus hautement symbolique, il est le lieu de la lutte pour la reconnaissance et la définition légitime de ce qui, dans l’espace social général, peut, doit recevoir son « onction », être élevé à la dignité de question politique, être inscrit à l’ordre du jour de l’agenda politique.

Toutefois, en démocratie, il est le champ qui par construction principielle, devrait refléter l’état du champ social général. Or on assiste à l’autonomisation du champ politique, dont Pierre Bourdieu rappelait qu’à la différence de celle des autres sous-champs sociaux, manifestation du processus normal et a priori favorable à l’émancipation individuelle, de différenciation sociologique, elle contrevenait aux principes démocratiques qui exigent que ce champ exprime le plus fidèlement possible l’état des rapports sociaux.

Quelles sont les relations de cette autonomisation du champ politique avec l’affaiblissement, voire le brouillage, désormais multi-décennal, d’une distribution classique de l’électorat avec, singulièrement, la montée de l’abstention, tout particulièrement parmi les membres des classes populaires dont le vote Front National n’arrive qu’en seconde position des « préférences » politiques ?

Comment s’articule-telle à la dé-réalisation des classes populaires, au sens de déconstruction progressive de la conscience d’en être membre, de leur dé-mobilisation politique, soulignant alors l’importance décisive des conditions sociales de possibilité d’une capacité politique, à l’édification desquelles les partis politiques, les syndicats, les « mouvements de jeunesse » contribuaient (davantage) auparavant.
Comment la fabrication d’une opinion politique (i.e. impliquant des choix quant à l’organisation de la vie sociale) dépolitisée (i.e. présentée efficacement comme relevant de la nécessité technique, par exemple à propos des retraites, de la libéralisation du commerce international, de la construction de prisons…) joue-t-elle son rôle ?

C’est à cet ensemble de questions non exhaustives, que nous convions les intervenantes et intervenants à apporter des éléments de réponse lors de la 15e édition de L’oeuvre de Pierre Bourdieu en pratiques ; cela auprès d’un public élargi (notre initiative a vocation à diffuser les résultats des travaux de sciences sociales), composé de citoyen-nes (conférences pour tou-tes), d’étudiant-es (sessions à l’U.P.P.A.), de l’ITS Pierre Bourdieu, de lycéen-nes du cycle terminal de la série Economique et sociale.

Pour le Comité scientifique,
Sami Bouri, Abel Kouvouama

Progr._Pierre-Bourdieu
Argum._Pierre-Bourdieu