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Language as archive : European linguistics and the social history of the Sahara and Sahel in the eighteenth and nineteenth century

Projet ERC STG LANGARCHIV (2018-2023) réunissant une équipe transdisciplinaire d’historiens, de linguistes et d’anthropologues africains et européens pour explorer les matériaux en langues africaines comme sources pour écrire l’histoire de l’Afrique.

Coordination Camille Lefebvre (CNRS-IMAf)

The eighteenth and nineteenth century history of the central Sahara and Sahel has primarily been written using European or jihadist Arabic sources. This has led to an overwhelming emphasis on religion, politics, and geography as core themes that shaped social and cultural dynamics in this region. By focusing on sources in African languages—until now largely forgotten by historians—the ERC-STG LANGARCHIV project aims at revealing a new corpus of texts in Hausa and Kanuri collected in the 18th and 19th century. Between 1772 and 1913, European explorers, scholars, missionaries, and colonialists collected hundreds of word-lists, glossaries, grammars, proverbs, tales, anecdotes, (auto)biographies, life narratives, travel narratives, as well as accounts of historical and social events, folktales, or songs in these two African languages, and published them in books or papers or preserved them in their personal archives. From the second half of the 18th century, alongside the geographical curiosity for what was called discovering Africa, European science took a growing interest in describing African languages. Missionaries, explorers and amateurs based in Tunis, Cairo Freetown or Bahia in Brasil, asked slaves and pilgrims to tell the stories they knew in their own languages or to write them using Arabic script. Because their purpose was descriptive linguistic the collectors intervened as little as possible on what they were told. On the other hand, invaluable manuscript documents are preserved in private family libraries, as trace of a very long tradition in these regions of learning and scholarly writing in ajami, meaning African language written in Arabic.

These materials in African language are pathways ‎into local worldviews and local knowledge system that can helps us explore the history of Sahelian societies through the stories that Sahelians told about themselves in their own languages. The project combines an epistemological analysis of European scientific attention for African languages, consolidated by an anthropology of verbal to look at how the stories were told, what their performance context was and how they were shaped by the public-speaking or literary conventions, through the collaboration between historians, linguists, and anthropologists.

La langue comme archive

Dans un contexte où les sources sont rares, comme c’est le cas pour le Sahara et le Sahel central aux XVIIIe et XIXe siècles, l’historien doit faire preuve de créativité et constamment chercher des sources et des méthodologies nouvelles. Pour écrire l’histoire du Sahara et du Sahel central aux XVIIIe et u XIXe siècles, les historiens disposent aujourd’hui de deux sources principales : les écrits des leaders du djihad de Sokoto et les récits des explorateurs européens. Les écrits djihadistes, produits dans ce qui est actuellement le Nigéria du nord, sont exprimés dans une langue étrangère l’arabe et sont caractérisé par un biais social et religieux prononcé – ils sont écrits par une élite qui méprise les sujets et les pratiques qu’ils perçoivent comme non-musulmanes. Tandis que les explorateurs européens sont exclusivement des hommes. Ils n’ont donc accès ni aux femmes, ni à l’intérieur des maisons et ne peuvent observer la vie quotidienne ou familiale, enfin ils sont généralement sourds à la complexité des hiérarchies sociales locales.

Le projet LANGARCHIV a pour objectif de révéler un corpus de sources primaires resté quasiment inexploré, les matériaux en haoussa et en kanouri recueillis aux XVIIIe et XIXe siècles. La qualité et l’ampleur des données collectées afin de décrire ces deux langues par des savants et des amateurs germanophones, britanniques et français entre 1772 et 1918 et publiés ou conservées en Afrique de l’Ouest, en France, en Allemagne, en Angleterre et au Brésil plaident pour une réévaluation en profondeur de ces matériaux. Nous disposons de matériaux allant de la simple liste de mots, à des glossaires ou des grammaires, ainsi que des corpus de proverbes, de contes, des chansons, des pièces de théâtre, des récits de vie ou de voyage, des descriptions d’événements anodins ou historiques. Auxquels s’ajoutent les matériaux écrits en ajami (langue africaine rédigé avec des caractères arabe) conservés dans la région dans les bibliothèques privées familiale.

LANGARCHIV est un projet international réunissant une équipe transdisciplinaire d’historiens, de linguistes et d’anthropologues africains et européens pour explorer les matériaux en langues africaines comme sources pour écrire l’histoire de l’Afrique. Combinant une analyse épistémologique de l’intérêt scientifique européen pour les langues africaines et la volonté d’écrire une histoire sociale du Sahara central et du Sahel qui dépasserait les biais des sources djihadistes et européennes, ce projet s’appuie sur deux méthodologies complémentaires : l’histoire sociale des sciences et des savoirs et l’anthropologie du texte et de la performance orale. Ce projet mettra en lumière un corpus de sources historiques dans une langue parlée actuellement par près de 50 millions de personnes dans 6 pays, et contribuera de ce fait au développement et à la promotion de la connaissance historique sur ces régions.