Séance du 9 novembre 2020, de 11h à 13h
Visioconférence :
Cette séance aura lieu sur la plateforme zoom. Si vous souhaitez y assister, envoyez un message à Florence.brisset-foucault@univ-paris1.fr ou mbodj@cnrs.fr
– Charlotte Grabli, historienne, CIRESC,
« Pauline Lisanga : la première voix du Congo moderne ? »
Dès sa création en 1949, la radio coloniale conçue pour les auditeurs congolais « Radio Congo belge pour Africains » (RCBA) engagea une speakerine pour présenter ses programmes. Repérée sur les planches d’un théâtre de Léopoldville (aujourd’hui Kinshasa) pour sa parfaite maîtrise du français, Pauline Lisanga devint rapidement une icône médiatique associée à la nouvelle modernité sonore du Congo. Entretenant un lien étroit avec la scène de la « musique moderne congolaise » (ou « rumba congolaise »), Lisanga se distinguait par ailleurs comme l’une des rares chanteuses de l’époque, connue pour ses collaborations avec l’African jazz de Joseph Kabasele, l’un des orchestres phares de Léopoldville. Son parcours nous permettra d’éclairer la production de nouvelles formes de respectabilité féminine, à la fois associées à la modernité des ondes et distantes de l’urbanité musicale fondée sur la fréquentation des bars et des associations féminines qui œuvraient dans le domaine de la mode et de la danse. En croisant des sources de l’époque et des interviews plus récentes avec Pauline Lisanga et d’autres figures des années 1950, on tâchera de retracer sa carrière et de montrer comment la féminisation des ondes transformait la subjectivité des auditeurs à l’ère de la décolonisation. On examinera ainsi comment les femmes dites « libres » (catégorie coloniale) investirent la radiodiffusion et plus largement le monde musical pour façonner les formes de leur indépendance en ville et leur rôle dans l’invention du Congo moderne.