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Droit et folie en situation coloniale. Perspectives impériales comparées (XIXe-XXe siècles)

Appel à contributions pour le numéro 23 (2022) de Clio@themis. Revue électronique d’histoire du droit.


Argumentaire

L’histoire juridique de la folie en situation coloniale demeure un domaine quasiment inexploré dans le panorama de l’historiographie juridique française et, plus largement, européenne. Alors que dans la dernière décennie les études des historiens de la psychiatrie coloniale se sont multipliées et que les conceptions autochtones des « maux de l’âme » ont depuis longtemps retenu l’attention des anthropologues, les aspects juridiques du traitement de la maladie mentale dans les espaces ultramarins n’ont fait l’objet de l’attention des chercheurs que d’une manière résiduelle et accessoire.

S’inscrivant dans un terrain en friche et dans la continuité d’un chantier de recherche en cours1, ce numéro de Clio@themis se propose de poser les premiers jalons pour une étude historico-juridique de la folie en situation coloniale, aux xixe et xxe siècles. Il s’agit d’entamer la reconstruction d’un pan encore largement méconnu de l’histoire du droit et de la justice coloniale et d’analyser, sous une perspective comparée et pluridisciplinaire, les facettes multiples des rapports du droit à la maladie mentale dans le contexte de la colonisation européenne. Le droit en situation coloniale se caractérise par l’application du principe de la personnalité de la loi dont le pluralisme juridique est le corollaire. En outre, les lois métropolitaines ne sont pas toujours directement applicables dans les espaces ultramarins, alors que la réglementation par décrets émanant des autorités locales est abondante. L’administration joue un rôle central et insolite dans la production des normes tout comme dans le déroulement de la justice. Les conflits entre juridictions et administrations sont d’ailleurs fréquents. L’expression « droit en situation coloniale » désigne dès lors, ce mode de fonctionnement spécifique et cette articulation particulière entre la justice et l’administration.

Dans ce cadre si particulier, est-il possible d’émettre l’hypothèse d’une approche juridique spécifique de la maladie mentale, surtout par rapport aux populations colonisées ? Quand le droit colonial se saisit-il de la maladie mentale ? Suivant quelles modalités ? Quels en sont les enjeux ? Qu’est-ce que la folie pour le législateur, pour les juristes et pour les administrateurs coloniaux ? Est-ce que le traitement juridique de la maladie mentale des « indigènes » présenterait des spécificités par rapport au traitement des troubles psychiques chez les « Européens » ? Inspiré par ces questionnements, le dossier Droit et folie en situation coloniale veut adopter un regard large, apte à capter la multiplicité des manifestations de la maladie mentale dans les discours et dans les pratiques juridiques outre-mer, dans le but d’en faire jaillir les spécificités liées au contexte de la colonisation.

La perspective comparative devra permettre de dresser un état des lieux des recherches sur le sujet dans le cadre historiographique. Il s’agit d’abord de faire attention aux différents pays européens ayant bâti un empire colonial à partir de la deuxième moitié du xixe siècle, mais pas seulement. Dans l’analyse du rapport du droit colonial à la folie, comparer veut dire également prendre en compte les spécificités territoriales, au sein d’un même empire, en considérant les différences de statuts (territoriaux et personnels). Dans cette direction, une importance centrale est accordée à la comparaison entre les espaces ultramarin et métropolitain. La comparaison peut enfin être entendue comme circulation de solutions, de techniques et de pratiques juridiques, en centrant l’attention sur les échanges entre les différentes expériences européennes de la colonisation.

Les contributions à ce dossier suivront trois thèmes principaux qui, compte-tenu du caractère pionnier des recherches en la matière, permettront d’aborder en même temps des questions de nature méthodologique. Les trois lignes directrices n’étant évidemment pas étanches, les articles proposés pourront les parcourir de manière transversale. Le regard pluridisciplinaire est également le bienvenu.


Calendrier et modalités des propositions d’articles

Les propositions d’articles (d’un maximum de 3500 caractères, espaces comprises) devront être envoyées à l’adresse suivante : silviafalconieri@gmail.com pour le 1er juin 2021.

 Remise des articles au 1er décembre 2021.
 Première évaluation des articles début 2022.
 Remise des articles corrigés au 1er mai 2022.
 Seconde évaluation des articles mi-2022.
 Parution prévue en novembre-décembre 2022.

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