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Monuments et documents de l’Afrique ancienne : recherches en cours en histoire, histoire de l’art et archéologie

Séminaire coordonné par Claire Bosc-Tiessé (EHESS - CNRS / Institut des mondes africains), Amélie Chekroun (CNRS / Institut de recherches et d’études sur les mondes arabes et musulmans), Marie-Laure Derat (CNRS / Orient & Méditerranée), Anaïs Wion (CNRS / Institut des mondes africains)

Année universitaire : 2022 / 2023
Périodicité : Mensuel (mercredi), de 9h30 à 12h30
Localisation : INHA, 2 rue Vivienne, 75002 Paris
Calendrier : Du 9 novembre 2022 au 7 juin 2023

Présentation :

Ce séminaire teste et confronte hypothèses et méthodes pour montrer comment les sciences humaines écrivent aujourd’hui le passé de l’Afrique. L’objectif est de présenter et discuter les recherches en cours sur l’Afrique ancienne, entendue dans un sens très large de la préhistoire jusqu’au pré-contemporain, prenant en compte aussi bien les régions au sud du Sahara que celles qui sont au nord. Il s’agit non seulement d’établir une veille sur les tendances actuelles de la recherche mais surtout de voir comment celle-ci peut se faire en situation de pénurie documentaire dans une interdisciplinarité en acte. Ce séminaire permet aussi de mobiliser et rassembler les recherches sur l’Afrique pré-contemporaine pour créer un lieu d’échanges et dynamiser le champ.

PROGRAMME :
 mercredi 9 novembre 2022 :
Ingrid Houssaye-Michienzi (CNRS, Orient et Méditerranée), « De Buda à Būda. Enjeux et modalités d’une expédition de cuivre au Sahara vers 1400 : l’apport des sources commerciales du fonds Datini ».

 mercredi 7 décembre :
Amélie Chekroun (CNRS, Institut de recherche sur les mondes arabes et musulmans) et Simon Dorso (ERC HornEast, Institut de recherche sur les mondes arabes et musulmans), « Le site de Kwiha (Tigray, Éthiopie) de la période aksoumite au XVIe siècle : premier bilan des fouilles et recherches en cours ».

  • Résumé :
    Depuis 2018, le site de Kwiha Cherqos près de Mekelle est étudié dans le cadre du projet ERC HornEast. Connu depuis le XIXe siècle pour receler des vestiges monumentaux antiques et des inscriptions funéraires arabes médiévales, plus récemment identifié comme le « Bellete » visité par Francisco Álvares (m. 1541 ?) et mentionné dans plusieurs itinéraires de la fin du Moyen Âge, les fouilles menés sur le site permettent d’en préciser la séquence d’occupation depuis le IIe siècle de notre ère et fournissent un rare éclairage sur la culture matérielle de la région et son évolution sur près de deux millénaires. L’étude du cimetière et de ses épitaphes (fin Xe-XIIIe s.), pour moitié inédites et qui constituent actuellement le plus important corpus épigraphique arabe d’Éthiopie, a quant à elle mise en évidence l’existence sur les hauts-plateaux septentrionaux, cœur du royaume chrétien, d’une communauté musulmane bien connectée au reste du monde islamique et dont les pratiques funéraires sont désormais documentées

 mercredi 18 janvier 2023 :
Anaïs Wion (CNRS, Institut des mondes africains), « Transcrire les carnets de voyage d’Antoine d’Abbadie (1838-48) : travail collaboratif et Intelligence Artificielle ».

  • Résumé :
    Antoine d’Abbadie a vécu onze années en Éthiopie au milieu du XIXe siècle. Voyageur savant et curieux de tout, il a copié dans une vingtaine de carnets de notes relatives à l’histoire, les cultures, les langues, la géographie des populations de la Corne de l’Afrique. Ceux-ci sont conservés à la BnF et demeurés presque entièrement inédits. Le projet « Transcrire Antoine d’Abbadie » a permis l’acquisition de la totalité du texte des carnets par deux méthodes : la transcription manuelle et collaborative et l’HTR (Handwritten Text Recognition). La présentation dans ce séminaire sera l’occasion de montrer comment s’est développé ce projet en insistant sur la part d’inconnu et de nouveauté surgissant entre le moment de rédaction du projet (alors que le contenu de carnets n’est pas connu) et sa réalisation, avec la disponibilité croissante de nouvelles technologies comme l’HTR ou les outils de crowd-sourcing. Les aspects collaboratifs sont en effet fondamentaux dans ce projet et posent la question des relations avec le « grand public », en France et à l’étranger, particulièrement en Éthiopie. Enfin, nous aborderons la question de l’édition de ce corpus extrêmement complexe, notamment dans sa structuration.

 mercredi 15 février :
Martina Ambu (LabEx Hastec, EPHE, Laboratoire d’études sur les monothéismes) et Perrine Pilette (CNRS – laboratoire Orient et Méditerranée), « Relations entre Égypte et Éthiopie chrétiennes aux XIIIe-XVIe siècles : recherches en cours sur les sources hagiographiques, historiographiques et documentaires ».

  • Résumé :
    Les relations entre Égypte et Éthiopie chrétiennes s’inscrivent dans une longue histoire, le Patriarcat copte d’Alexandrie ayant été institutionnellement à la tête du diocèse éthiopien du IVe au XXe siècle. Ce lien particulier donna naissance non seulement à de nombreuses productions intellectuelles et artistiques, mais aussi à d’intenses échanges tant au niveau individuel que sociétal.
    Dans le cadre de ce séminaire de recherche, après un aperçu de l’histoire de ces relations, nous aborderons plusieurs cas d’étude (articles sous presse et projets en cours), mettant en évidence la variété et la complexité de ces productions, au rang desquelles des sources hagiographiques, historiographiques et documentaires, traduites de l’arabe en guèze et vice-versa (notamment les Synaxaires copto-arabe et éthiopien). Ce faisant, l’accent sera mis sur l’importance du travail interdisciplinaire et du dialogue entre spécialistes.

 mercredi 15 mars :
Robin Seignobos (Université Lumière Lyon 2, CIHAM - Histoire, Archéologie, Littératures des mondes chrétiens et musulmans médiévaux), « Archives d’une frontière : les documents arabes de Qaṣr Ibrīm (Nubie, XIe-XIIe siècle) ».
Birgit Ricquier (Université libre de Bruxelles), « Des arbres et des racines en linguistique à l’histoire des communautés en forêt équatoriale : le cas du nord-est de la République Démocratique du Congo ».

 mercredi 12 avril :
Yves Gleize (INRAP / laboratoire « De la Préhistoire à l’Actuel : Culture, Environnement et Anthropologie »), « Pratiques et espaces funéraires à Lalibela (Éthiopie) : bilan des dernières recherches ».
Claire Bosc-Tiessé (INHA/EHESS), « Les temporalités de productions et d’usages d’images à Lalibela (Éthiopie, (XIIIe ?-XXIe s.) ».

 mercredi 10 mai :
Muna Abubeker (Addis Ababa University), « Slavery in the 19th century Harari Court Document »

  • Résumé :
    Les archives d’un tribunal de Harar datant du XIXe siècle, qui a enregistré différents cas de mariage, d’héritage, de divorce, de transaction foncière et d’autres affaires entre 1827 et 1837, mentionnent 58 esclaves et 157 ex-esclaves sur un total de 2197 cas. Les affaires judiciaires étaient enregistrées quotidiennement par le qadi Abdurahman Muhammad, nommé par le souverain de la ville-état de Harar. Ces cas seront discutés à la lumière de la pratique légale de l’esclavage et du régime judiciaire de la charia. Des questions telles que l’acquisition, le traitement et la manumission des esclaves seront abordées ainsi que les perspectives qui s’offraient aux anciens esclaves.

Charles Clément (Université Paris-1), « La fortaleza de São Sebastião : protéger la présence portugaise contestée dans le Sud-Est africain (mi-XVIe - XVIIe siècle) »

  • Résumé :
    Cette intervention présente la stratégie portugaise de consolidation de sa présence dans le Sud-Est africain à partir de la deuxième moitié du XVIe siècle, dans un contexte de remise en question de sa prééminence en Afrique de l’Est. Par l’étude de la correspondance administrative de l’empire et des chroniques lusophones, ce travail s’inscrit dans une recherche en cours sur l’histoire de l’île de Mozambique, de l’implantation des Portugais sur la côte et de leurs relations avec l’arrière-pays makua.

 mercredi 7 juin :
Samuel Sanchez (Université Paris-1, Institut des mondes africains), « Que tirer des registres fonciers du royaume merina ? (Madagascar, XIXe s.) »

  • Résumé :
    Au XIXe siècle, le royaume d’Imerina apparait comme un Etat particulièrement innovant en matière de contrôle administratif et d’enregistrement, notamment des ressources économiques. Plusieurs recherches ont déjà été menées sur le rôle de cet Etat dans les rapports marchands avec l’étranger, notamment sur l’organisation douanière. L’essentiel de la société, en Imerina même, était orienté vers la production agraire, mais les historiens n’ont jusqu’à ce jour que très peu d’informations, en premier lieu sur l’importance de cette production elle-même, et en second lieu sur le rôle que jouaient les ressources agricoles dans les recettes de l’Etat. Il s’agira dans cette communication de présenter et expliquer comment comprendre les documents comptables (registres fonciers) issus des archives de la monarchie. Suite à ce préalable méthodologique, je proposerai quelques hypothèses sur l’activité agricole malgache au XIXe s. et le rôle qu’elle jouait dans la construction de l’appareil politique merina.

Matthieu Provençalle (Université Paris-1), « À la recherche des voix africaines dans les récits européens : la relation de voyage de Nicolas Villault de Bellefond et la légende de l’antériorité française en Afrique de l’Ouest (XVIIe s.) »

  • Résumé :
    En 1669 paraît une relation de voyage intitulée Relation des costes d’Afrique appelées Guinée. Dans celle-ci, l’auteur, le Français Nicolas Villault de Bellefond, rapporte les détails de son expédition en Afrique de l’Ouest, en 1666-1667 à bord du navire l’Europe, « soubz la Commission de la Compagnie des Indes occidentales de France ». À la fin de l’ouvrage, un chapitre d’une trentaine de pages explique, de manière très détaillée, que les Normands auraient dépassé le cap Bojador dès 1364, soit près de soixante-dix ans avant les Portugais. Durant une cinquantaine d’années, ils auraient mené plusieurs expéditions commerciales et auraient même installé un fort sur le site d’Elmina. Les guerres de religion en France auraient ensuite mis fin à ces activités normandes.
    Au XIXe siècle, ces assertions exposées par Villault de Bellefond sont reprises et déclarées véridiques par des intellectuels français pour légitimer les prétentions coloniales françaises en Afrique de l’Ouest. Ce n’est que dans la première moitié du XXe siècle, grâce aux travaux de Charles de La Roncière et de Raymond Mauny, que cette histoire est définitivement considérée comme une légende. Les deux historiens considèrent notamment que Villault de Bellefond a écrit pour le compte de Colbert, afin d’appuyer le projet colonial du ministre français en Afrique. Sans écarter cette dimension, mes recherches m’ont cependant conduit à élaborer une autre hypothèse : selon moi, cette légende a vu le jour sur la Côte de l’Or à la fin du XVIe siècle/début XVIIe. Elle aurait été « inventée » par des populations africaines afin de pousser les Français à commercer avec eux et à s’installer sur leurs côtes, et aurait ensuite été reprise par Nicolas Villault de Bellefond dans sa relation de voyage.


CONTACT :
claire.bosc-tiesse@inha.fr