Appel à contributions
Ambivalent et polymorphe, le rire est un phénomène social complexe. Il peut être suscité par une stimulation physique, surgir au détour d’une conversation banale, résulter d’un trait d’esprit ou encore se déployer sous des formes d’humour spectaculaires. Parfois il ouvre un moment de loisir et accentue le temps de la fête, tandis que d’autres fois il accompagne des élans de tristesse, de honte ou de colère. Si les limites des cadres du jeu sont toujours plus ou moins imprécises, celles des cadres du risible paraissent abyssales. Hétérogènes, volatiles, fugitifs, éphémères, les contextes de manifestation du rire et du faire-rire sont difficiles à saisir et posent un problème méthodologique de taille aux anthropologues. En réponse, les travaux classiques ont eu tendance à décontextualiser ces phénomènes. Ainsi, le faire-rire s’est trouvé raccroché aux institutions, comme l’attestent les analyses structuro-fonctionnalistes des parentés à plaisanteries et des rites d’inversion. Les anthropologues et les spécialistes des Humor Studies l’ont souvent aussi cloisonné à des contenus textuels, à l’instar des études sur la figure mythologique du trickster ou des analyses formelles des collections de « blagues en boite » dites canned jokes (Raskin & Attardo 1986). Plus récemment, l’anthropologie des émotions a réexaminé le rire, en l’envisageant comme un symbole sous l’angle quasi exclusif des catégories discursives (Le Breton, 2016). Dans ces divers travaux, le rire et le faire-rire apparaissent en définitive désincarnés, détachés de leurs expériences immédiates, généralement réduits à des dyades schématiques : norme/transgression, cohésion/exclusion, dissociation/résolution. En outre, la question du rire et du faire-rire est presque toujours réduite au champ de l’humour. Or, si le rire et l’humour peuvent être liés, ils ne sont pas interdépendants.
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Date limite : 15 novembre 2023