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Enseigner le droit hors des frontières nationales (XIXe-XXe siècles)

Cycle de journées d’études

Direction scientifique :
Catherine Fillon, Silvia Falconieri, Laetitia Guerlain et Florence Renucci

Comité scientifique :
Frédéric Audren, CNRS, École de droit de Sciences Po
Isabelle Giraudou, University of Tokyo
Jean-Louis Halpérin, École normale supérieure
Guillaume Tronchet, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Emmanuelle Picard, École normale supérieure de Lyon

Argumentaire :
Depuis quelques décennies, l’histoire de l’enseignement du droit à l’époque contemporaine est, en France, un chantier en plein essor. En témoigne la création de la Société pour l’histoire des facultés de droit en 1983, qui a permis la coordination et le développement d’un champ de recherches jusqu’alors délaissé. Cependant, cette histoire des facultés de droit est longtemps restée une histoire des doctrines qui y étaient enseignées et des écoles qui s’y affrontaient. Il a fallu attendre une période plus récente pour que l’historiographie se saisisse des lieux de l’enseignement du droit en eux-mêmes, dans le cadre d’une socio-histoire attentive au fonctionnement de l’institution, à son personnel, ses étudiants, ou encore ses ressources budgétaires. Alors que de telles études fleurissaient déjà dans d’autres disciplines (v. par exemple les travaux de Charles, 2004 ; Picard, 2007 ; Singaravelou, 2009 ; Ferté et Barrera, 2010), les initiatives se sont multipliées ces dernières années chez les juristes, parfois en lien avec les débats actuels liés à l’autonomie des universités ou la rénovation de l’enseignement du droit dans un contexte de globalisation (Ancel et Heuschling, 2016 ; Jamin et Van Caeneghem, 2016).

Ce renouvellement des approches s’est fréquemment adossé à la question des disciplines juridiques. Il a également emprunté le chemin d’un intérêt pour le collectif enseignant. Siprojuris, la base de données bio-bibliographique des professeurs de droit français entre 1804 et 1950, rassemblant 600 individus, a vu le jour, fruit d’un travail collectif coordonné par Catherine Fillon. Ouvrant de nouvelles perspectives pour l’histoire sociale des élites juridiques, cet important déport prosopographique s’est doublé d’un renouvellement de la biographie intellectuelle des professeurs de droit, désormais moins préoccupée de décréter l’existence de « grands juristes » que de décrypter les mécanismes concrets d’accession à la « grandeur intellectuelle ». Enfin, cette nouvelle histoire des facultés de droit s’est souvent concentrée sur des aires géographiques particulières, ce qui a donné lieu à la création, en 2008, du Réseau européen pour l’histoire de l’enseignement du droit.

Le progrès de l’histoire de l’enseignement du droit est par conséquent substantiel pour ce qui concerne la période contemporaine. Ce cycle de journées d’études entend profiter de ces nouveaux acquis pour poursuivre le travail déjà accompli en interrogeant un phénomène peu investi jusqu’alors : l’histoire de l’enseignement du droit hors des frontières nationales aux XIXe et XXe siècles. Certes, l’époque contemporaine est marquée, par rapport au Moyen Âge, notamment, par une incontestable nationalisation du droit et de son enseignement, amorcée à l’époque moderne. A priori, l’on pourrait penser que le temps des pérégrinations académiques est révolu. À y regarder de plus près, toutefois, rien n’est moins sûr. Empruntant des formes variées, une dilatation certaine de l’espace académique français peut également être observée à l’époque contemporaine (Audren et Halpérin, 2013).

 Dans le cadre de l’expansion militaire ou coloniale tout d’abord, la métropole entend plaquer son modèle d’enseignement du droit dans le cadre d’institutions dédiées (facultés de droit dans les départements annexés par l’Empire napoléonien ; École de droit d’Alger, expansion universitaire vers le Levant avec les Écoles de droit du Caire ou de Beyrouth, École de droit d’Hanoï, etc.).

 En dehors du cadre « autoritaire » des régions militairement occupées ou colonisées ensuite, nombreux sont les professeurs de droit, surtout à partir de l’entre-deux-guerres, à promouvoir le droit français à l’étranger, dans le cadre d’une diplomatie culturelle bien comprise (conférences, cours au sein d’instituts culturels, etc.).

Cette appréhension transnationale de l’enseignement du droit se situe par conséquent à l’articulation d’un triple questionnement : la réflexion similaire venue des historiens d’autres disciplines, qui se sont également saisis de cette question ; le tournant historiographique vers l’histoire globale ou connectée, ainsi que vers la question des circulations, qui entend interroger, voire dépasser les cadres nationaux habituellement retenus pour écrire l’histoire ; la problématique actuelle de la dénationalisation/ globalisation de l’enseignement du droit, qui agite la doctrine.

Il nous a semblé qu’un tel questionnement relatif à l’enseignement du droit hors des frontières nationales était de nature à combler un vide historiographique important, tout en éclairant certains enjeux actuels de la globalisation de l’enseignement du droit. Par ailleurs, les contributions de collègues étrangers pouvant offrir un éclairage similaire dans leurs pays seront particulièrement appréciées.

  • 1er volet - Les lieux et les formes de l’enseignement juridique hors de la métropole

QUAND :
Le 22 novembre 2018

OÙ :
École doctorale de droit
Salle André Citroën
24 rue Salomon Reinach
69007 Lyon

Ligne de tram T1, arrêt rue de l’Université

La première journée d’études est consacrée aux diverses modalités structurelles de l’enseignement du droit en dehors du cadre métropolitain. Si, dans ses colonies, un État peut finir par envisager de créer des facultés calquées sur le modèle de la métropole, il lui faut généralement faire preuve de davantage d’inventivité dans les territoires étrangers demeurés maîtres de leur souveraineté où, par surcroît, il peut être en concurrence avec d’autres États tout aussi désireux de promouvoir leur influence politique et juridique. L’éventail des multiples formes retenues, ponctuelles ou plus pérennes (des tournées de conférences, à la main-mise sur des écoles locales, en passant par la création d’instituts culturels…) mérite d’être précisé, mais aussi cartographié. Où ? Suivant quelles formes ? Selon quels partenariats et avec quels financements ? sont autant de questions auxquelles cette première journée souhaite apporter des réponses plus précises.

CONTACT :
laetitia.guerlain@u-bordeaux.fr

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