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Anthropologie du Sahel occidental musulman (Sénégal, Mali, Mauritanie…) : hiérarchies sociales, « castes » et esclavage

Séminaire organisé par Olivier Kyburz (maître de conférences à l’Université Paris-Ouest Nanterre-La-Défense Paris-X, LESC), Ismael Moya (chargé de recherche au CNRS, LESC), Jean Schmitz (directeur de recherche à l’IRD, IMAF).

Année universitaire 2013/2014
Périodicité : 2e et 4e jeudis du mois de 15h00 à 17h00
Localisation : Site Raspail, salle de réunion, 2e étage, 96 bd Raspail 75006 Paris
Calendrier :

Présentation

Ce séminaire est consacré à l’anthropologie des sociétés du Sahel occidental musulman comme de leurs diasporas internationales. Il portera cette année sur la question des hiérarchies sociales, souvent invisibles et encore mal comprises. La question des « castes » ou l’esclavage ne cessent de travailler sourdement ces sociétés, du ralentissement du développement dans la vallée du Sénégal aux conflits malien. Les « castes » et l’esclavage seront analysés dans trois contextes : rural, urbain et migratoire. Nous adoptons une approche relationnelle pour dépasser les problématiques exclusivement centrées sur des groupes définis en soi ou par leur origine. Nous croiserons principalement trois thématiques : l’islam, la parenté et la politique, pour analyser les économies morales et les valeurs qui permettent de rendre compte de ces catégories sociales et de leur mutabilité.

Séances

 9 janvier 2014

  • Allison Cressy, doctorante (IMAF, EHESS),
    Défrichage créateur de droit » ou « aménagement créateur de droit » ? L’usage des récits de fondation de village et de transferts de la terre agricole face aux concessions foncières dans la vallée du fleuve Sénégal en Mauritanie (communes de Tékane et de Dar el Barka)

Si agriculteurs haalpulaar et harâtîn reconnaissent en général trois moyens historiques et légitimes pour obtenir des droits de propriété d’un terrain (le défrichage, le don, et l’achat), le droit foncier mauritanien ouvre la possibilité à un quatrième : la concession d’un terrain à quelqu’un qui est capable de la « mettre en valeur ». Actées à la veille des événements de 1989 et œuvrant principalement sur des terres de décrue détenues par des nobles haalpulaar, ces « concessions foncières » font surgir des discours opposés de la propriété foncière légitime. Dans un contexte de transferts contestés, les récits de fondation et d’installation agricole des villages privilège une nouvelle version islamisée du « droit de défrichage » dans le cas des agriculteurs haalpulaar et le « don des terres par l’Emir » dans le cas des agriculteurs harâtîn.

  • Kader Mané, doctorant (IMAf, EHESS) et au Laboratoire genre (UCAD)
    Entre parenté et économie : étude comparative des enjeux sociaux du crédit à Ross Béthio et Thilé Boubacar (Sénégal)

Cette communication traite de la question du crédit et de l’endettement entre groupes dominants et subordonnés, entre factions et élites locales, présentant des jeux d’exclusion politique au regard des hiérarchies sociales dans la vallée du fleuve Sénégal. Elle analyse l’instrumentalisation du crédit comme vecteur de domination et d’exclusion des groupes sociaux ; la place et le pouvoir accordé au crédit dans la démocratisation de l’espace social et politique et, enfin, le contrôle du foncier comme principal enjeux de lutte politique entre groupes sociaux .
L’établissement des généalogies des exploitants se fera parallèlement au relevé du parcellaire de périmètres à l’aide de ceux établis par la SAED ou par télédétection. Ce recoupement des données permettra d’analyser la transmission des parcelles au décès de l’attributaire que les enquêtes par villages n’ont pas décrites (Tarrère-Diop et Soumaré 1995 ; Dahou 2004) et de recenser les modes de faire valoir : direct, par prêt, location, métayage (rempeccen pulaar) (Leroy 2004).
Le deuxième point de notre étude portera sur le pouvoir et les formes d’autorités au regard des changements politiques induits ces dernières années. Il semble qu’avant même le processus de démocratisation, l’introduction de l’irrigation par attribution « égalitaires » aux chefs de concession (jom galle pulaar, borom kër wolof) ait déjà ébranlé le système statuaire inégalitaire au profit des groupes subordonnés (castés, esclaves).

 23 janvier 2014
Corinne Fortier (Chargée de recherche CNRS, Laboratoire d’Anthropologie du Collège de France)
Genre, statuts, et activités des esclaves et des harâtîn de Mauritanie

La terminologie qui désigne les divers statuts d’esclaves emprunte largement son vocabulaire au lexique chromatique. De même, la catégorie statutaire de harâtîn, formée d’anciens esclaves ou de leurs descendants, loin d’être homogène est constituée d’une pluralité de statuts. Le terme de harâtîn lui-même pose problème. Or, je propose une autre explication du terme de hartânî dans la société maure, qui est probablement applicable aux autres sociétés sahariennes du Maghreb où ce terme est usité. Les femmes esclaves avaient un statut particulier relativement aux esclaves masculins dans la mesure où le maître dispose en plus de leur force de travail d’un droit sexuel et reproductif. Les harâtîn continuent pour leur grande majorité à accomplir les travaux effectués naguère par les esclaves selon une même division sexuelle du travail. Des rapports de domination de type clientéliste occultés par des liens de parenté dans une société où l’identité tribale reste importante se sont donc plus ou moins substitués à des relations esclavagistes.

Discutant : Jean Schmitz qui a également participé au dossier sur les harâtîn coordonné par Ann McDougall (University of ’Alberta) en collaboration avec Abdel Wedoud Ould Cheikh. Ce dossier rassemble des analyses d’enquêtes effectuées sur les deux rives du Sahara, en Mauritanie et dans le sud du Maroc (à paraître).

 27 mars 2014
Stefan Reichmuth (Professor of Arabic and Islamic Studies, Ruhr University Bochum (Allemagne))
Islamic Learning, Manuscript Culture and Arabic Writing in Nigeria (the Case of Ilorin)